Réunion de famille de Frédéric Bazille : focus sur un chef-d’oeuvre
La Réunion de famille est considérée à juste titre comme le chef-d’œuvre de Frédéric Bazille (1841-1870) et comme un jalon essentiel de la peinture pré-impressionniste. Le tableau a pour cadre la propriété familiale de Méric, près de Montpellier, où l’artiste se rend chaque été. Stimulé par l’exemple de Monet et de ses Femmes au jardin dont il vient de se porter acquéreur, Bazille choisit de réunir sur la terrasse haute de Méric, à l’ombre d’un marronnier, sa famille au grand complet : de gauche à droite, on reconnaît le peintre lui-même, son oncle Eugène des Hours, ses parents, Camille et Gaston Bazille, assis sur un banc, derrière, debout près de l’arbre, Émile Teulon et Pauline des Hours (nouvellement mariés), autour du guéridon de jardin, la tante Adrienne des Hours (sœur de Camille Bazille) et Thérèse des Hours, à droite près du muret, Marc Bazille et sa fiancée Suzanne Tissié, enfin Camille des Hours, la plus jeune des cousines de l’artiste.
Un portrait de la société bourgeoise
Bazille prépare attentivement sa composition à l’aide de nombreux dessins et fait poser les siens dans une demi-pénombre pour affirmer leur présence et leur volume, réservant au paysage, inondé de lumière, un faire plus large et audacieux. Cette sorte de conversation piece à l’anglaise (qui a peu d’antécédent dans la peinture française) est aussi le portrait d’une classe sociale en pleine ascension sous le Second Empire avec ses valeurs et ses règles intangibles, « c’est le chef-d’œuvre d’une race » dira Gaston Poulain, le premier biographe de l’artiste.
La jeunesse de l’Impressionnisme
Le rendu des belles matières tactiles, la splendeur du coloris rappellent Ingres, que Bazille admirait, tandis que les ombres dansantes sur le sol, la limpidité de l’atmosphère renvoient plutôt à Monet. C’est à Paris durant l’hiver 1868 que Bazille achève son tableau en s’aidant sans doute de photographies. Contre toute attente, le jury, plus tolérant cette année-là, accepte la toile pour le Salon. Plutôt mal placée, elle suscite peu de commentaires hormis celui de Zola qui décèle dans la toile « un vif amour de la vérité. […] On voit que le peintre aime son temps, comme Claude Monet, et qu’il pense qu’on peut être un artiste en peignant une redingote ». Frédéric Bazille meurt prématurément deux ans plus tard, à l’âge de 29 ans, au cours des combats de la guerre franco-prussienne.
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